L’un des aspects qui déconcerte le plus les non-philosophes concernant la philosophie est le fait qu’elle porte sur des questions dont les solutions apparaissent comme n’étant pas suceptibles de donner lieu à des réponses absolues. Ainsi, il arrive fréquemment que l’opinion oppose les mathématiques où les solutions apparaîtraient comme susceptibles d’être vraies ou fausses, les sciences de la nature où les faits sembleraient pouvoir être établis de manière certaine.
Pourtant lorsque l’on y réfléchit ce reproche fait à l’approche philosophique parait bien étrange. En effet, nous ne cessons dans l’action quotidienne ou dans les sujets sociaux et politiques de trancher des questions sur lesquelles nous n’avons pas de réponses absolues. Comme l’exprime justement Pascal, nous n’avons pas le choix: “ce n’est pas volontaire, vous êtes embarqués”. Il nous faut donc parier. La vie en société ne permet pas que ces questions ne soient pas tranchées dans un sens ou un autre. Doit-on interdire ou autoriser l’avortement ? l’euthanasie ? la peine de mort ? Ces questions sont tranchées par le droit, voire par les citoyens au cours d’un référendum.
Certes dira-t-on, il n’est pas possible de vivre en société sans trancher ces questions, mais en quoi la philosophie peut-elle nous être d’une quelconque utilité puisqu’elle ne permet pas de leur apporter une réponse absolue ? Un sentiment moral immédiat ne nous serait-il pas un guide plus sûre que la réflexion philosophique ?
L’intérêt de la réflexion philosophique ne porte pas en effet sur sa capacité à trancher des questions dont nous ne parvenons pas à fonder la solution de manière absolue. Son intérêt réside dans l’explicitation des présupposés qu’elle permet des différentes positions possibles, ainsi que dans l’analyse de leurs conséquences éventuelles. Elle permet en outre d’étudier la cohérence des justifications qui sous-tendent les positions sur différentes questions. Par exemple, il est clair que si l’on admet un principe de respect absolu de la vie humaine concernant l’embryon, il faut l’admettre également concernant la question de la peine de mort.
Ainsi, l’intérêt principal de la philosophie est celui de l’explicitation des positions prises par un individu ou un groupe d’individu et de leur cohérence systémique entre elles.
Ainsi si tel est le rôle que l’on peut assigner à la philosophie, dans ce cas, comme l’a montré paradoxalement Hume, ce n’est pas tant sur la philosophie que devrait se porter notre scepticisme, mais sur les sciences de la nature. En effet, l’épistémologie peut nous conduire à un scepticisme théorique sur la capacité des sciences à pouvoir fonder de manière absolue leurs résultats. En revanche, sur les questions pratiques, nous ne pouvons pas nous permettre d’être sceptique. De fait, ce n’est pas la philosophie qui nous conduit à trancher les questions pratiques, mais ce sont les exigences de l’action elle-même. La philosophie ne constitue qu’une réflexion sur l’explicitation des présupposés théoriques de ces choix et un examen de leur cohérence.
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tellytechno (mercredi, 23 octobre 2013 11:30)
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