Ecoute active et participation orale

 

 

La thématique de l’attitude positive d’un élève en cours n’est pas sans relever des ambivalences, voire des contradictions, de la doxa enseignante. Les travaux en pédagogie et en sociologie de la pédagogie font apparaître que le cours dialogué, faisant intervenir la participation orale des élèves est devenue la norme. Pourtant, il s’en faut pour que cette participation orale soit bien considérée, aussi bien du côté des élèves que des enseignants.

 

L’écoute active

 

Les travaux sur le rapport aux savoirs des élèves révèle que les élèves en difficulté ont une attitude passive face aux savoirs: écoute passive, recopiage mécanique… L’écoute passive est comparable au déchiffrage en lecture: l’élève lit ou écoute sans nécessairement comprendre le sens du propos.

 

A l’inverse, les élèves en situation de réussite scolaire ont souvent une attitude d’écoute active. Celle-ci ne consiste pas seulement à suivre le raisonnement de l’enseignant et à dégager le sens de son propos. Cette attitude se manifeste également par d’autres opérations intellectuelles: comme de percevoir les possibles enjeux pratiques de ce qui est enseigné, de percevoir les liens avec d’autres disciplines ou d’autres parties du cours…. L’écoute active, enfin, facilite le travail de mémorisation du cours.

 

La différence d’attitude dans la prise en note du cours distingue l’écoute passive de l’écoute active. L’élève qui est en situation d’écoute passive préfère le cours dicté. Il permet de prendre le cours de manière mécanique sans écouter ou comprendre. Il rassure. A l’inverse, l’élève actif préfère la prise de notes: elle implique une sélection de l’information et une reformulation qui suppose un effort de compréhension.

 

La participation orale

 

C’est une doxa bien établie aujourd’hui, tant du côté des enseignants que de celui des élèves, qu’un bon cours se caractérise entre autres par le fait que l’enseignant fait participer les élèves et que les élèves participent en retour. Pourtant, le discours sur la participation orale en classe est ambigu, aussi bien du côté des élèves que de celui des enseignants.

 

Du côté des élèves: l’élève qui participe en cours peut être soupçonné de vouloir être bien vu du prof, de fayoter. Dans une telle vision, le fait que l’élève participe au cours non pas pour plaire au professeur, mais par intérêt pour le contenu même du cours n’est pas présent. Il est d’autant moins présent que le rapport aux savoirs est extrinsèque. Le contenu de cours n’est pas perçu comme ayant un intérêt en lui-même, mais comme étant un curriculum prescrit qui permet d’obtenir des bonnes notes.

 

Du côté des enseignants: la participation orale peut être perçue comme une menace. Les conseils donnés par les formateurs aux enseignants consistent à dissuader la participation trop active d’un élève qui, par ses questions, peut éloigner du cadre du cours et mettre en péril la tenue de classe.

 

Le discours enseignant sur la participation orale peut d’ailleurs noter le décalage entre des élèves qui excellent dans leur travaux à l’écrit et qui sont mutiques en classe et des élèves qui participent de manière pertinente en classe mais ont des notes très médiocres.

 

Il faudrait d’ailleurs sans doute se demander si les deux ne peuvent pas être en lien. Un élève excellent à l’écrit qui participe trop activement en cours peut risquer d’être perçu comme trop arrogant par les autres élèves, comme les écrasant. Au contraire, un élève considéré comme médiocre à l’écrit, qui s’investit dans la participation orale, n’encourt pas nécessairement les mêmes reproches: sa participation peut être perçue comme une stratégie de compensation légitime face à ses difficultés à l’écrit.

 

Le discours psychologisant sur la participation orale des élèves met également en valeur le fait que l’élève qui participe cherche à exister dans l’espace de la classe et à y être reconnu par l’enseignant.

Néanmoins, il est possible également que, sur un plan subjectif, la participation orale intervienne dans l’engagement dans la tâche et le rapport au temps vécu. L’élève qui participe peut y trouver une stratégie pour obtenir un meilleur engagement dans la tâche: mieux se concentrer, mieux suivre, faire passer l’heure plus rapidement, mieux mémoriser…

Il est ainsi possible que l’élève qui participe en cours dans une matière, empêché de participer, puisse se désintéresser du cours ou dériver son énergie vers une attitude de perturbation du cours.

 

Conclusion: Néanmoins, pour conclure, il est possible de noter que l’écoute active et la participation orale peuvent également donner à l’élève l’impression d’un investissement dans la tâche qui, pour autant, ne permet pas de compenser un travail personnel insuffisant pour maîtriser les savoirs à acquérir.

 

 

Bibliographie:

 

Barrère Anne, Travailler à l’école, Rennes, PUR, 2004.

Charlot Bernard, Bautier Elisabeth, Rochex Jean-Yves, Ecole et savoir dans les banlieues, Paris, Armand Colin, 1992.

Felix Christine, “Des gestes de l’étude personnelle chez des collégiens: une perspective comparatiste”, Revue Spirale-e, n°33, 2004.

 

 

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Commentaires: 2
  • #1

    léo (dimanche, 17 août 2014 16:54)

    Je ne vais pas mettre tout le monde dans le même sac, mais malheureusement la grande majorité des professeurs en font partie.

    Depuis la maternelle jusqu'à l'université, la participation n'a jamais payé, du moins elle fonctionnait toujours pour les mêmes.

    Je me souvient encore de tout ces profs qui disaient sans arrêt qu'ils préfèrent nettement un élève qui participe (même si l'élève se trompe), qu'un élève qui travail bien mais reste toujours dans son coin.

    Tout ces profs qui promettaient en début d'année de toujours récompenser généreusement tout ceux qui participe par une très bonne note de participation.

    Malheureusement la plupart du temps c'était faux. Le prof se fâchait si tu disait une erreur, c'était à base de : vous êtes déjà en terminal, vous êtes déjà en licence etc... et vous osez sortir une telle chose...
    Les camarades de classe n'étaient jamais très sympathique avec toi dans ce genre de situation.
    Mais tu te dis, de toute façon à la fin du semestre, génial tout ça va payer, donc on s'en fiche des remarques des gens.
    Et la bizarrement, tu te rend compte, que les chouchous, qui n'ont pas spécialement participé, les très bon étudiants qui n'ont pas spécialement animé les cours, sont récompensé d'une superbe note de participation, et toi tu te tape un 10.5 qui semble limite arracher l'âme du prof.

    Donc non désolé, mais la participation c'est NUL !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

    P.S : En prenant la décision de ne pas participer, cela n'a rien changé à ma moyenne, à part le fait que je ne subissais plus de moqueries

  • #2

    Irène (lundi, 18 août 2014 09:38)

    Dans ce que vous écrivez, il me semble que vous rattachez beaucoup la participation orale au fait d'avoir une bonne note et peu au fait de pouvoir mieux suivre et comprendre le cours....
    Cela donne certainement un exemple d'un effet délétère de la notation qui conduit à considérer que la note est plus importante que le contenu cognitif du cours.