Handicap : Pédagogie pour une vie indépendante

 

En France, le handicap est cité comme une des quatre grandes discriminations que doit combattre l'Education nationale, à travers la transmission des valeurs de la République,  et sa prise en compte est au coeur de l'école inclusive.

 

Néanmoins, à la différence d'autres pays, cette question ne fait pas l'objet d'une approche critique. Aux Etats-Unis, le handicap donne lieu à des Critical Disability Studies qui mettent en valeur la construction sociale et les rapports sociaux inégalitaires lié aux situation de handicap. Cette approche critique conduit à inclure le handicap dans le cadre de l'intersectionnalité.

(Voir par exemple: http://www.jceps.com/wp-content/uploads/PDFs/10-1-12.pdf).

Ces approches critiques donnent lieu ensuite à des pédagogies critiques du handicap comme c'est le cas dans l'article ci-dessous.

 

NB : Nous avons gardé l'expression de « diversité fonctionnelle » qui est très peu utilisée en France, mais que l'on trouve parfois au Quebec, pour désigner les personnes en situation de handicap. Le terme a d'abord été initié dans la littérature scientifique en espagnol, avant d'être repris en anglais. L'expression est présente également dans les théories queer pour éviter un discours normatif sur le corps handicapé jugé socialement anormal.

En France, l'expression en « situation de handicap » tend à être de plus en plus admise : indiquant que ce n'est pas la personne qui est déficiente, mais que c'est la situation qui crée le handicap. Le handicap n'est donc pas alors une caractéristique inhérente à la personne, mais une situation relationnelle relative un environnement plus ou moins adapté.

 

Traduction de la deuxième partie de : Miguel A. García Oca - Mª Soledad Arnau Ripollés FIMITIC – Dpto. Filosofía y Filosofía Moral y Política (UNED), « Université et diversité fonctionnelle. Pédagogie pour une vie indépendante », 2011.

 

Approches pédagogique pour une université émancipatrice et inclusive

 

La pédagogie critique, comme vous le savez, constitue une des théories pédagogiques les plus connues du discours social et éducatif contemporain, reconnue comme une pédagogie d'inspiration humaniste et critique qui propose un questionnement fort et soutenu des excès de la rationalité instrumentale, de la science moderne positiviste, et surtout, de la logique capitaliste qui caractérise notre société globalisée et postmoderne.

 

L’œuvre de l'éducateur brésilien, Paulo Freire (1921-1997), à travers sa contribution théorique et pratique, fait partie de la pensée pédagogique dans différents pays du monde et plus particulièrement dans toute l'Amérique latine.

 

La dimension qu'a prise son œuvre fait de Freire une référence incontournable, dans tous les cadres éducatifs, de la pédagogie critique, à travers son travail connu comme « la pédagogie de la libération ».

 

Dans un de ses livres les plus célèbres, Pédagogie de l'opprimé (1975), il présente non seulement ce qui est une nouvelle pédagogie, mais une véritable perspective pour la libération authentique de l'être humain, qu'il soit oppresseur ou opprimé. Dans ce livre, Paulo Freire critique le système traditionnel de l'éducation (ce qu'il appelle « l'éducation banquaire) et présente une nouvelle pédagogie où les éducateurs/trices et les apprenants/tes travaillent conjointement pour développer une vision critique du monde dans lequel ils vivent.

 

Cette « pédagogie » critique, libératrice, émancipatrice, insoumise, de l'espoir… et autres adjectifs montre que l'éducation possède une forte composante socio-politique, et historique, qui fait qu'en fonction du moment et des circonstances, on établie une relation entre le professeur et l'élève de manière à ce qu'elle serve le maintient du statut quo (les théories de la reproduction en éducation) ou bien que cela serve de moteur au changement socio-politique, et que cela permette d'en finir avec l'antagonisme : « oppresseurs/opprimés ».

 

En dépit de cela, la vigilance et la pertinence de la pédagogie critique, y compris la contribution de Paulo Freire, est souvent interrogée. Cependant, les auteur-e-s de cet article considère qu'il peut être très intéressant d'intégrer à toute ces perspectives que développe la théorie critique de l'acte éducatif, la question spécifique de la diversité fonctionnelle à partir de la perspectives des Droits Humains que propose les Nations Unies dans la Convention internationale (de décembre 2006) au moyen de la reconnaissance de l'altérité (différences, diversités…).

 

La pédagogie critique met en relief les théories constructivistes du fait éducatif (c'est-à-dire, l'éducation se transforme en une construction sociopolitique) et pour autant cela peut servir la culture dominante pour sa perpétuation ou au contraire, cela peut contribuer, comme l'a bien montré Paulo Freire, à la transformation sociale de la réalité, pour chercher des voies alternatives qui favorisent l'émancipation, l'autonomie et l'égalité des droits.

 

L'ONU promeut une perspective sociale du fait humain spécifique que constitue la diversité fonctionnelle dans laquelle ce sont les facteurs environnementaux et éducatifs qui sont les plus déterminants dans ce qui génère des discriminations dans la vie de ce groupe, tant au niveau individuel que collectif.

 

Ainsi, cette pédagogie critique peut servir à générer un contexte éducatif plus opportun pour les différentes réalités humaines qui produisent les diversités. Sans aucun doute, l'éducation a été conçue comme l'institution paradigmatique du projet des Lumières, et, s'il est certain que le monde intellectuel n'est pas unanime sur l'origine de la modernité, et encore moins sur sa fin, ce qui est arrivé, c'est que cette dite modernité a établi la suprématie de la science rationnelle et universelle comme unique chemin pour parvenir à la « vérité ». En ce sens, il est nécessaire de garder à l'esprit que le philosophe Kant a considéré la rationalité humaine et son autonomie comme le cœur de sa théorie. C'est précisément, la « capacité d'auto-détermination » et en cela « la capacité de rationalité » qui détermine ce qu'est un être humain (comme être indépendant « moralement »…).

 

Cela s'est imposé avec le temps. Dans l'espace philosophique, politique et moral, on a promu cette « capacité de rationalité » de l'être humain comme quelque chose qui lui inhérent et d’indiscutable, ce qui conduit au concept de « liberté ». De ce fait on a considéré que la « rationalité » conduisait à l'auto-détermination et à l'autonomie. C'est-à-dire que les personnes qui sont de manière interne libres, qui s'auto-gouverne, disposent également d'un haut degré de moralité.

 

Au cours de son histoire, la modernité n'a pas réalisé les attentes pour parvenir à un monde plus juste tel qu'on avait pu l'imaginer après la rupture avec l'ancien régime. De fait, le développement industriel a révélé son pouvoir destructif et une tendance à établir des groupes humains privilégiés, à un niveau plus ou moins élevé, organisant la société au service de leur bien-être matériel exclusif. De ce fait, s'est développé un mal-être croissant à l'égard de la modernité, dont les effets sont évidents, y compris, dans l'éducation. De fait, un des résultats a été la constitution d'une éducation spécialisée.

 

De là, la pédagogie critique constitue un chemin alternatif comme une utopie qui été en capacité de mettre en valeur des contradictions dans le discours positiviste, ahistorique et dépolitisé de l'éducation moderne et à la fois de retrouver la confiance en l'action humaine pour transformer la réalité.

 

La pédagogie critique propose une éducation basée sur le dialogue pour approfondir les principes démocratiques et générer une véritable égalité d'opportunités.

 

Tout cette idéologie éducativo-pédagogique « alternative » doit être capable de s'accorder avec l'éducation inclusive que promeut l'UNESCO, et vice-versa cela du fait de l’hétérogénéité du collectif de femmes et d'hommes, avec tous les types et degrés de diversité fonctionnelle, et pour que l'auto-détermination soit complète pour plusieurs d'entre-eux. Sur ce sujet, il convient de recourir à la théorie que proposent Palacios Rizzo et Romanach Cabrero au sujet du nouveau paradigme et modèle de la diversité :

 

« Le modèle de la diversité propose des clefs pour construire une société dans laquelle toutes les femmes et les hommes voient préservés pleinement leur dignité. Une société dans laquelle la diversité, et concrètement la diversité fonctionnelle, soit vue comme une différence avec une valeur et non comme une charge indépendamment de l'âge à laquelle elle se produit. Une société dans laquelle il existe une égalité des opportunités et où personne ne soit discriminé du fait de sa différence. En définitive, une société plus juste dans laquelle toutes les personnes soient les bienvenues, acceptées et respectées pour le simple fait d'être humains ».

 

Ainsi, il est important de lier ces tendances et pratiques critiques éducatives contre cette nouvelle modalité du paradigme de la diversité, avec l'éducation inclusive. L'UNESCO définie cette approche éducative de la manière suivante :

 

« L'éducation inclusive et de qualité se base sur le droit de tous les élèves à recevoir une éducation de qualité qui satisfasse ses besoins de base dans l'apprentissage et l'enrichissement de leurs vies.

En prêtant une attention spéciale aux groupes marginalisés et vulnérables, l'éducation intégratrice et de qualité cherche à développer tout le potentiel de chaque personne.

Son objectif final est d'en finir avec toutes les formes de discrimination et de favoriser la cohésion sociale ».

 

Dans les mots de Quesada Sancho : «  L'éducation inclusive est une manière de regarder l'horizon qui favorise la co-existence par l'accomplissement des droits de l'homme en vue d'un monde meilleur ». Et il continue en ajoutant :

 

« en 1994, on a organisé en Espagne « la Conférence mondiale sur les besoins éducatifs particuliers »… durant laquelle ont été exposés les principes, les politiques et les pratiques pour répondre aux besoins éducatifs de participation de toutes les personnes au sein du système commun de l'éducation »… dont le principe directeur défini que tous les centres éducatifs doivent accueillir les étudiants, indépendamment de leurs conditions, parmi lesquelles la situation de handicap ».

 

En accord avec cette réalité, l'UNESCO reconnaît le groupe des filles et des garçons avec une diversité fonctionnelle comme un groupe marginalisé et vulnérable. Et il continue en disant :

 

« Actuellement, 75 millions d'enfants se trouvent exclus de l'éducation. 7/10 se trouvent en Afrique sub-saharienne ou dans l'Ouest de l'Asie. 60 % de ces mineurs sont des filles qui résident dans les Etats Arabes et 66 % se trouvent dans le sud ou l'ouest de l'Asie. Les causes principales de l'exclusion sont la pauvreté, l'inégalité de genre, le handicap, le travail des enfants, le fait de parler une langue minoritaire, d'appartenir à un groupe indigène et de vivre dans un milieu nomade et rural ».

 

Les termes « vulnérables » et « marginalisés » sont des concepts tellement vagues qu'ils embrassent des personnes très distinctes et des groupes qui ne peuvent pas exercer leur droit à l'éducation ».

 

Les enfants avec un handicap:

 

Dans le monde, il y a plus de 650 millions de personnes handicapées avec des déficiences qui pour le moins les empêchent de participer à la vie sociale. Souvent ces personnes se font peu d'illusion sur la possibilité d'aller à l'école, d'obtenir un emploi, d'avoir leur propre maison, de fonder une famille et d'élever ses enfants, de profiter de la vie sociale ou d'exercer un droit de vote. La grande majorité d'entre elles manque d'accès aux magasins, aux installations publiques et aux moyens de transports.

 

Le rapport de suivi de l’Éducation Mondiale de 2010 indique que, bien que comparable, il est difficile d'obtenir des données fiables. Une source très citée calcule que dans le monde, il y a 150 millions d'enfants qui vivent avec un type de handicap. Environ 4/5 vivent dans un pays en développement. En outre, beaucoup de ces millions d'enfants vivent dans une famille avec des parents qui ont également un handicap. Dans tous les groupes d'âge, le nombre d'handicaps, aussi bien modérés qu'aigus, sont plus élevés dans les pays à revenus bas et moyens que dans les pays riches. La région qui présente l'indice le plus haut est l'Afrique Subsaharienne (chiffres fournis par l'OMS et l'UNICEF en 2008).

 

Les Universités doivent être des espaces éducatifs pleinement inclusifs et capables d'accueillir adéquatement les différentes diversités humaines. Dans ses pratiques éducatives et didactiques, dans ses curricula, dans ses recherches, elles doivent réaliser un travail ferme contre l'intolérance et les différences. De même que l'on voit que l'égalité de genre doit être un champ transversal ; il doit en être de même en ce qui concerne la diversité fonctionnelle, l'écologisme, le respect des droits humains, la constitution d'une culture de la paix.

 

[ L'auteur présente ensuite un schéma avec en son centre le terme diversité et autour les termes suivants : Religion, orientation sexuelle, fonctionnalité, genre, culture, race, âge… La légende porte la mention : schéma des différentes discriminations].

 

La pédagogie critique doit créer des contextes et des pratiques éducatives qui délégitiment les discours hégémoniques et dominants, qui pervertissent les différences et les diversités humaines, en les transformant en les « autres » : « autres », distant-e-s et différent-e-s et en même temps « interprété-e-s » comme inférieur-e-s. Pour tout cela, il est nécessaire de lutter dès l'éducation et pour créer un système éducatif qui élimine les asymétries de pouvoir. La recherche est un élément de changement fondamental dans le cadre universitaire.

 

L'Education Inclusive, que promeut la Convention internationale de l'ONU, doit compléter cette pédagogie critique, afin qu'elle soit une authentique pédagogie de la libération, en devenant une pédagogie de la diversité ou des différences. La « Pédagogie de la Vie Indépendante », également, doit se développer pour constituer une Culture de la Vie Indépendante qui soit le point de départ avec l'objectif de comprendre de manière appropriée que, tous et toutes, avec ou sans diversité fonctionnelle, et/ou avec d'autres types de diversités, nous avons des capacités, nous avons des droits.

 

La « vie indépendante » : philosophie et praxis

 

Afin de mieux comprendre cette nécessaire « Pédagogie de la vie Indépendante », il est important d'en refaire l'histoire. Durant les années 60/70, né aux Etats-Unis, un nouveau mouvement social, cette fois de personnes avec une diversité fonctionnelle qui, sans aucun doutes, marque un avant et un après dans l'histoire sociopolitique de ce groupe humain et des événements historiques en général.

 

C'est ainsi, que le nouveau Mouvement de Vie Indépendant (Independent Living Movement, ILM), avec le temps, est devenu mondial. Ce mouvement a transformé la vision que l'on a du droit humain spécifique au sujet de la diversité fonctionnelle, et de la conception de la personne en générale.

 

Cependant, et bien qu'il ait joué un important rôle social, il est significatif de noter qu'il a été exclu de la multitude des manuels sur les « nouveaux mouvements sociaux ». Dans ce cas, ce serait une omission curriculaire fondamentale. Ce point pourrait impliquer une lecture sur le fait que la catégorie de « diversité fonctionnelle » n'est pas conçue comme ayant un caractère transversal.

 

Pourtant, il est pertinent de constituer une « culture de la Vie Indépendante ». Nous avons besoin, pour que cela soit possible, de générer et de développer, une « pédagogie de la Vie Indépendante » capable d'enseigner et de transmettre de nouvelles valeurs qui contribuent à contextualiser la réalité humaine de la diversité fonctionnelle, à partir d'autres horizons normatifs et point de départ. C'est ce qu'exprime Juan José Marana :

 

« La vie indépendante est un paradigme, un modèle à partir duquel la personne avec handicap exerce sa pleine capacité de choix comme être humain et citoyen dans la plénitude des conditions, en liberté, de manière individuelle, contrôlant tout et chacun des aspects de leur vie pour accéder au même rang d'égalité de droits et de devoirs que ses concitoyens sans handicap ».

 

Frances Hasler commente à ce sujet que : « la vie indépendante est une philosophie de l'émancipation et de la pratique qui fortifie les personnes avec des handicaps et leurs permet d'influer, de choisir et de contrôler chaque aspect de leur vie ». John Evans (ex-président du Réseau Europa sur la Vie Indépendante), pour sa part, met en relief dans sa propre définition l'aspect de la liberté, comme continue de nous l'expliquer Hasler :

 

« L'essence de la vie indépendante est la liberté de prendre des décisions sur ta propre vie et de participer pleinement à la communauté ».

 

Le Paradigme ou Modèle de la Vie Indépendante, développé par Gerben DeJong à la fin des années 1970, propose un « modèle alternatif » au traditionnel modèle médico-réhabilitateur dont est issue l'Education spécialisée. Cette nouvelle perspective, en fin de compte, implique un changement ontologique et épistémologique profond sur la réalité humaine en soi, et sur le fait humain particulier de la diversité fonctionnelle. Pour ce motif, cela a également une répercussion sur le cadre éducatif…. Et, ce nouveau modèle, fournira les premiers jalons vers une pleine normalisation des personnes avec des diversités fonctionnelles.

 

Bank-Mikkelsen et Bengt Nirje ont établi ce que l'on a appelé les Principes de la Normalisation. Ce nouvelle posture qui naît au sein du champ scolaire est rapidement devenue une nouvelle stratégie pour intégrer la personne avec une diversité fonctionnelle dans tous les moments de la vie (famille, école, milieu de travail et social). La normalisation implique d'intégrer la personne avec une diversité fonctionnelle dans le milieu qui l'entoure, autant que cela soit possible. Wolfensberger, cité par Toledo Gonzalez, la définie de la manière suivante :

 

« L'utilisation de moyens aussi normatifs que possibles, en accord avec chaque culture, pour parvenir à maintenir des conduites et des caractéristiques personnelles qui soient aussi proches possibles des normes culturelles du milieu où vit la personne ».

 

Dans les termes de la Convention International des Nations Unis, il faut se rappeler que dans son article 19 : « Le droit de vivre de manière indépendante et être inclus dans la communauté » promeut la pleine inclusion des personnes avec tout type et degré de diversité fonctionnelle dans les milieux ordinaires.

 

Un pas de plus : le modèle de la diversité

 

Finalement nous arrivons au nouveau MODELE DE LA DIVERSITE, lequel s'est constitué comme un développement du « paradigme de la Vie Indépendante ». Comme l'affirme Palacios Rizzo et Romanach Cabrero :

 

« Le modèle de la diversité propose les clefs pour construire une société dans laquelle toutes les femmes et les hommes voient leur dignité pleinement préservée. Une société dans laquelle la diversité, et en particulier la diversité fonctionnelle, soit vue comme une différence avec une valeur et non comme une charge indépendamment de l'âge où cela se produit. Une société dans laquelle il existe une égalité d'opportunités et où personne ne soit discriminé pour sa différence. En définitive, une société plus juste dans laquelle toutes les personnes soient bienvenues, acceptées et respectées pour le simple fait qu'elles sont des êtres humains ».

 

La philosophie mondiale de la Vie Indépendante, comme nous l'avons vu, se constitue en une philosophie de l'EMANCIPATION ou EMPOWERMENT. Comme nouveauté, elle a la particularité d'être née des personnes concernées directement par cette situation, et toutes les autres personnes qui les appuient. Son aire d'action se centre sur l'AUTODETERMINATION (le plein développement de l' « autonomie morale ») et dans le CONTROLE DE SA PROPRE VIE. Cependant, elle met l'accent sur le handicap dans les CAPACITE humaines.

 

Ainsi que le commente Arnau Ripollés :

 

« ...de ce Modèle de la Vie Indépendante (version états-unienne) est né : le modèle social (version anglo-saxonne), le modèle de la « perspective des capacités » (version états-unienne), et le modèle de la diversité (version espagnole).

 

Le modèle de la diversité est né en Espagne, en 2006, de la main de Palacios Rizzo et Romanach Cabrero, il constitue une des meilleures manière de rompre avec la dichotomie : handicap/capacité. Son aire d'action néanmoins est une nouveauté : la DIGNITE de la personne avec une diversité fonctionnelle (aussi bien intrinsèque qu'extrinsèque).

 

Effectivement, il provient du paradigme de la Vie Indépendante et en ce sens, cela signifie qu'il accorde de la « valeur » à la vie des personnes avec des diversités fonctionnelles et qu'il travaille à partir de la perspective des Droits humains pour son plein exercice (conception de la « dignité extrinsèque »).

 

L'apport du Modèle de la Diversité au paradigme de la Vie Indépendante est que nous ne pouvons pas oublier qu'il y a des personnes qui ne peuvent pas s'auto-déterminer à aucun moment de leur vie et pour lesquels il n'est pas possible d'établir un développement de capacités. Ici, la Vie Indépendante « fait ce qu'elle peut » pour trouver une solution au moyen de l'appui des capacités des proches ou des représentants légaux.

 

Cependant, comme le proclame son slogan : « Rien sur nous, rien sans nous » : cependant les personnes qui ne peuvent le valoir par elles-même dans le cadre moral n'ont pas d'opportunité au sein de ce paradigme. Pour elle, il est de la première importance que l'on transfère l'attention sur la question de leur DIGNITE propre, fondamentalement, intrinsèque. A ce sujet, Palacios Rizzo et Romanach Cabrero continuent en disant :

 

« […] Le paradigme ici proposé de la diversité dans lequel on remarque, sans nier la prémisse antérieure, que la valeur de l'être humain en lui-même, sa dignité intrinsèque, est dissociée et indépendante qu'une quelconque considération d'utilité sociale ».

 

Ces réflexions, sans doutes, peuvent contribuer à ce que les courants pédagogiques de type néomarxiste, comme la Pédagogie critique, dont nous avons traité dans ce texte, évoluent vers de nouveaux horizons qui fassent que, les différentes diversités humaines, peuvent être présentes dans leurs discours, dans leurs pratiques d'émancipation, y compris, quand nous ne pouvons pas nous représenté nous mêmes. Peut être, une des formules pour que le changement se fasse au moyen de l'incorporation du Modèle de la Diversité, à travers son référent inconditionnel de la dignité inhérente à tout être humain.

 

Le pari pour une inclusion éducative authentique, dans ce cas,, implique nécessairement, d'ouvrir la voie à une nouvelle conception de la réalité humaine spécifique : la perspective des droits humains (du droit humain à l'éducation en particulier). Pour que cela soit possible, nous devons partir de pédagogies qui travaillent à une transformation sociale et politique de la pratique éducative et au-delà, du monde de la vie en général.

 

Cependant, il faut faire la remarque, que si cela arrive, ce sera important de chercher des moyens pour que l'inclusion, effectivement, puisse être menée à terme. Maintenant, si toutes les diversités humaines sont des richesses, toutes (vraiment TOUTES, y compris les personnes qui ne peuvent se représenter elles-mêmes ou celles pour lesquelles que nos capacités pour les appréhender dans nos cadres normatifs sont limitées) devraient être respectées et à cette fin, les mesures d'appui qui sont effectuées devront être prudente et non agressives.

 

En guise de conclusion :

 

[…] En conclusion, il reste à dire que, Paulo Freire, a terminé son voyage dans la vie, en pensant tout le temps que pour pouvoir rompre avec les asymétries et les inégalités structurelles existantes entre des êtres humains et d'autres, il est inévitable que les groupes humains qui se trouvent dans la position « d'opprimés » accèdent à une Éducation, non pas à une éducation qui serve la reproduction des structures asymétriques (« l'éducation bancaire » comme l'appelle Freire), mais une ÉDUCATION POUR LA LIBÉRATION (« Éducation problématisatrice » comme l'appelle Freire).

 

Le pédagogue brésilien, nous a montré que le premier pas pour parvenir à la transformation sociale et politique dans notre monde, c'est commencer par le processus de conscientisation. Le fait de prendre conscience et de reconnaître la différence, et l'oppression que l'on souffre à cause de cela. Dans ce sens, la philosophie de la Vie Indépendante, véritable impulsatrice du « modèle social de la diversité fonctionnelle » nous est d'une grande utilité. La littérature britanique existente autour du modèle sociale met en son centre les « théories sociale (de l'oppression) » de cette condition humaine spécifique.

 

Cependant, c'est une éducation avec d'importants contenus humanistes, philosophiques, sociaux, historiques et axiologiques, où le technico-scientifique a sa place, évidement, mais… sans oublier, le plus humain et humanisant…. tant sur le plan des pratiques éducatives quotidiennes que sur le plan de la recherche.

 

Ces réflexions, sans doute, peuvent contribuer à ce que les courants pédagogiques, de type neomarxistes, comme la Pédagogie critique, dont nous avons traité dans ce travail, évoluent vers de nouveaux horizons qui fassent que les différentes diversités humaines puissent être présents dans ces discours et ses pratiques d'émancipation, y compris quand nous ne pouvons pas nous représenter nous mêmes.

 

Peut-être, comme nous l'avons vu, une des formules pour le changement peut être le fait d'incorporer le Modèle de la diversité fonctionnelle à travers la référence à l'inconditionnelle dignité inhérente à tout être humain.

Si les diversités humaines sont une richesses, toutes, sans exceptions aucune, alors les mesure d'appui qui l'on adopte pour la pleine inclusion devront être respectueuses des différences, pour ne pas les « éliminer ». De ce fait, cela ne pourra pas être des mesures agressives, mais conciliatrices des différences.

 

Mettons en œuvre une « Pédagogie pour une Vie Indépendante »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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