Pédagogie critique publique : l’intérêt de la méta-théorie critique

 

 

La méta-théorie critique peut constituer un outils de conscientisation dans le cadre d’une pédagogie critique publique.

 

La pédagogie critique publique

 

En Amérique du Nord, la pédagogie critique publique constitue un sous-courant de la pédagogie critique en particulier théorisé par Henry Giroux.

 

La pédagogie critique publique se propose d’étudier les discours hégémoniques et les discours contre-hégémoniques comme des sortes de pédagogies qui visent une éducation publique dans le sens soit de l’aliénation, soit de l’émancipation, soit également avec des effets plus ambigus.

 

La pédagogie critique publique peut également avoir un rôle d’éducation populaire. Elle vise à diffuser auprès du grand public les recherches menées en pédagogie critique publique.

 

En particulier, le rôle méta-théorique des intellectuel-le-s n'est pas de prendre position, mais de clarifier les termes utilisés dans les débats publics, d'en dégager les présupposés et les enjeux. 

 

Une expérience d’éducation populaire : l’Université populaire des mouvements sociaux

 

Le concept de l’Université populaire des mouvements sociaux a été imaginé par Boaventura de Sousa Santos.

 

Il consiste à faire discuter entre eux différents actrices/acteurs des mouvements sociaux comme des militant-e-s, artivistes, des chercheuses/rs engagé-e-s…

 

L’idée de De Sousa Santos, c’est que le manque d’alliance entre les mouvements sociaux vient du fait qu’ils y a entre les différents mouvements sociaux – par exemple anti-racistes et féministes – des préjugés. La discussion permettrait de lever les préjugés entre les acteurs/actrices.

 

Rôle d’une méta-théorie critique dans une pédagogie critique publique

 

Néanmoins, il est possible de douter qu’il s’agisse uniquement de préjugés. Il y a aussi au-delà des préjugés, des véritables contradictions théoriques entre les mouvements sociaux qui tiennent à leur grilles de lecture et/ou à leurs revendications.

 

Le rôle pédagogique de la méta-théorie critique est de clarifier les controverses, d’en faire apparaître les présupposés et les enjeux philosophiques.

 

La méta-théorie critique n’est pas simplement une sociologie des controverses. Elle ne procède pas seulement à une cartographie des controverses entre les mouvements sociaux.

 

La méta-théorie critique est une philosophie analytique des controverses entre mouvements sociaux en clarifiant les problèmes, en mettant à jour les ambiguïtés dans les termes...

 

La méta-théorie critique ne tranche pas les controverses. Elle est un outils de clarification philosophique des controverses.

  

Conclusion:

 

La méta-théorie critique constitue un sous-champ de la méta-théorie des controverses. Il s'agit d'une philosophie analytique dont l'objectif est de clarifier les présupposés, les termes et les enjeux philosophiques des controverses étudiées en sociologie des controverses.

 

Exemple:  Meta-théorie critique : l’exemple de la controverse féministe sur le « voile islamique »

 

La question du voile islamique est un objet de désaccord au sein du féminisme. Nous allons comparer ici la manière dont la sociologie des controverses et la méta-théorie des controverses abordent la question.

 

La sociologie des controverses.

 

La sociologie des controverses identifie les acteurs en présences (associations, personnalités intellectuelle et politique…), les arguments qui sont opposés.

 

Elle étudie également la manière dont les arguments évoluent au cours de l'histoire de la controverse.

 

(Voir par exemple : Nicolas Dot-Pouillard, « Les recompositions politiques du mouvement féministe français au regard du hijab », SociologieS, 2007. URL : http://journals.openedition.org/sociologies/246 )

 

L’approche méta-théorique :

 

Elle se situe au niveau de l’analyse philosophique de la controverse.

 

Elle vise à déterminer les problèmes philosophiques sur lesquels il y a désaccord entre les actrices et les implications philosophiques des réponses à ces questions. 

 

Par exemple: 

 

- Un symbole religieux peut-il être oppressif en soi ? → Cette question pose celle du pouvoir oppressif des réalités symboliques. Une réalité d’ordre symbolique peut-elle avoir en elle-même un pouvoir d’oppression ? Ou l’oppression ne peut-elle découler, en dernière instance, que de l’organisation matérielle de la société ?

 

- Les religions sont-elles nécessairement aliénantes ? → Une réponse positive à cette question implique que l’athéisme serait consubstantiel à tout mouvement de libération.

 

- Les femmes voilées sont-elles aliénées ? → Cette question en implique une plus générale qui est la suivante : Les opprimé-e-s peuvent-elles/ils être aliénés ? Une réponse positive à cette question implique qu’il y aurait besoin que d’autres les aide à s’émanciper. Cela pose alors corrélativement la question de savoir comment ceux qui émancipent ce sont eux-mêmes émancipés. 

 

L'objectif de la méta-théorie critique des controverses n'est pas de trancher ces problèmes, mais de les identifier et d'en faire apparaître les implications philosophiques et pratiques.