Socio-éthique professionnelle et adultisme

 

 

Comment appréhender l'âgisme à partir de la socio-éthique ?

 

La socio-éthique professionnelle combine trois pôles: l’analyse sociologique, la prise en compte du cadre juridique et la réflexion éthique.

 

L’enfant: philosophie et droits de l’enfant

 

L’enfant est pris entre deux conceptions. La première sous prétexte de le protéger tend à le transformer en objet. L’affirmation du bien de l’enfant peut en effet justifier paradoxalement les maltraitances. C’est ce qu’évoque le titre du livre d’Alice Miller, “ C’est pour ton bien”: c’est parfois en se réfugiant derrière un prétendu “bien de l’enfant” se cachent abus et maltraitance.

 

L’autre posture opposée consiste à considérer l’enfant comme un adulte. Sous prétexte de considérer que la posture de l’adulte relève de l'âgisme ou de l’adultisme - une domination des adultes sur les enfants- l’enfant est considéré comme un adulte autonome. Néanmoins, une telle posture conduit à des écueils car auquel cas, il faudrait rendre valide le consentement des enfants à avoir des relations sexuelles ou encore le travail des enfants sur la base de leur consentement.

 

En réalité, l’enfant est un être au statut ambivalent. D’un côté, il est un être qui a besoin de soin, mais d’un autre côté, il doit être reconnu comme une personne digne de respect. Ce statut est complexe dans la mesure où la dignité de la personne s’est construite dans la modernité libérale en lien avec la notion d’autonomie. Or celle de l’enfant n’est pas pleine et entière du fait de l’impératif de protection. De ce fait, les éthiques du care sont sans doute plus à même de penser plus facilement le lien entre protection et respect de la personne.

 

Ce statut ambigu de l’enfant explique pourquoi l’enfant ne relève pas directement de la Convention internationale des droits de l’homme, mais qu’il y a une Convention internationale spécifique aux droits de l’enfant qui souligne à la fois le besoin de protection de l’enfant et le respect qui doit lui être dû qui se traduit par une relative autonomie.

 

Sociologie des enfants

 

Martine Court, dans son ouvrage Sociologie des enfants (La Découverte 2017) consacre deux chapitres aux différences au sein de l’enfance relativement à la classe sociale et au genre. Ces inégalités sociales sont tout d’abord économique: en France un enfant sur 5 vit en dessous du seuil de pauvreté. Ces inégalités sociales sont également culturelles: elles se manifestent dans l’accès aux loisirs culturels, dans les trajectoires scolaires…

 

Ces différences sont également en lien avec l’éducation genrée. Celle-ci est marquée entre autres par des différences dans les vêtements et les jouets. Elle se note également comment ces distinctions sont là également présentes dans les loisirs ou les trajectoires scolaires.

 

Socio-ethique professionnelle des enseignants et respect des élèves

 

Dans l’élève humilié, Pierre Merle recueille des souvenirs d’étudiants enseignants-stagiaires dans lesquels ils se souviennent d’avoir assisté à une situation où un élève était humilié. L’humiliation peut-être définie comme un acte où la dignité de la personne n’est pas respectée.

 

On peut admettre que le cadre juridique fait obligation au professionnel de respecter l’égale dignité de chaque individu quelque soit son genre, sa classe sociale ou son origine migratoire.

 

Néanmoins, il est possible de s’interroger si la question de l'humiliation peut être pensée de la même manière en fonction de la position sociale de l’élève ? Ce qui humilie une personne est-elle la même chose en fonction de son genre ou de son origine sociale.

 

Par exemple une demande scolaire peut ne pas avoir le même impact en fonction du niveau socio-économique des parents de l’élève. On peut ainsi se poser les questions suivantes: Demander la profession des parents (quand par exemple un parent est au chômage)

 

Mais on peut se demander s’il n’y a pas d’autres formes d'humiliation plus masquées. Par exemple demander aux élèves de réaliser un devoir qui nécessite l’aide des parents alors que certains enfants ne peuvent pas être aidés à la maison. Est-ce que ce n’est pas les confronté à une sorte d’humiliation indirecte ?