La délibération éthique et l’agir éthique

 

 

Il existe plusieurs approches qui ont été développées, en particulier au Canada, pour aborder les situations problèmes professionnelles sous un angle éthique. Quels sont les différents critères pris en compte ?

 

 

Remarques introductives :

 

- Une première variable qui peut être prise en compte, c’est si le/la professionnel/le est amené à prendre la décision seul-e ou si c’est une décision collective. Néanmoins, il est possible également de noter que même s’il s’agit d’une décision individuelle, le ou la professionnel-le peut être amené à discuter avec d’autres personnes impliquées dans la décision ou encore avec des pairs pour prendre des conseils. Il peut d’ailleurs s’agir d’un premier conseil possible en délibération éthique que d’essayer de recueillir plusieurs points de vue sur la situation de manière à pouvoir prendre en compte les différentes dimensions impliquées.

 

- Il existe des méthodologies didactiques pour travailler en éthique. Là encore, il ne faut pas confondre la didactique de l’éthique et l’éthique. La didactique fournit des outils pour aider à la délibération éthique. Mais les outils ne constituent pas la réflexion éthique en elle-même. En effet, par exemple selon les grilles de délibération éthique, on va prendre en compte tel ou tel point. En réalité, c’est la situation qui commande les dimensions qui sont pertinentes à intégrer dans la démarche. Une grille de délibération éthique n’est qu’une aide pour didactiser la démarche de réflexion éthique. L’important c’est avant tout la pertinence de la réflexion éthique.

 

Dimensions prises en compte dans les démarches de réflexion éthique :

 

- La description de la situation : Bien souvent les démarches de réflexion éthique s’appuient sur la méthode par cas. Il est donc nécessaire d’être en capacité de fournir une description aussi précise et complète possible du cas professionnel. Le travail collectif permet d’avoir une phase où il est possible de poser des questions visant à préciser les faits.

 

- Les connaissances : Certaines démarches proposent de faire apparaître les connaissances scientifiques dont on dispose pour éclairer les faits exposés dans le cas (ex : sociologie, psychologie sociale.…).

 

- La formulation des problèmes : Les démarches de délibération éthique cherchent à faire apparaître les problèmes éthiques qui se posent. Cela peut-être le dilemme éthique auquel est confronté le/la professionnel/le. Les valeurs qui sont en opposition entre les différentes personnes.

 

- L’exploration des différentes positions éthiques : Ce moment consiste à explorer les conséquences positives et négatives des différentes solutions possibles du ou de la professionnelle. Ou encore il s’agit de déterminer les différentes valeurs des acteurs/trices en présence et leurs conséquences.

 

- Le cadre juridique et déontologique : il s’agit des différents textes juridiques qui s’appliquent à cette situation et les textes institutionnels qui s’appliquent aux professionnels. L’éthique constitue la marge de choix face à une situation à l’intérieur du cadre déontologique et juridique. La règle juridique est trop générale pour s’appliquer à tous les cas professionnels. D’où la nécessité de recourir à la réflexion éthique. Il est important de bien faire attention si le problème éthique n’est pas tranché dans un certain sens par le cadre déontologique car parfois le cadre déontologique impose des obligations aux professionnels qu’ils doivent appliquer de manière impératives.

- La décision éthique : Elle consiste en particulier dans une hiérarchisation des valeurs contradictoire en présence.

 

- Les pistes d’action : Il s’agit de modalités d’action envisagées pour réaliser la décision éthique.

 

Références :

 

Jacques Quintin, Anne-Marie Boire-Lavigne, « Grille de délibération en éthique clinique ». URL : https://www.usherbrooke.ca/bdethique/fileadmin/sites/bdethique/documents/GRILLE_DE_DELIBERATION_EN_ETHIQUE_CLINIQUE_Bureau_de_developpement_de_l_ethique_FMSS_UdeS_2012.pdf

 

La prise de décision éthique (utilisé par l’ordre des ingénieurs) - http://gpp.oiq.qc.ca/demarche_de_prise_de_decision_ethique.htm

 

 Module 5. Une méthode d'analyse des pratiques d'intervention, de soutien clinique et de gestion, perçues sous l'angle de l'éthique », , Le souci éthique dans les pratiques professionnelles. Guide de formation, sous la direction de Fortin Pierre, Parent Pierre-Paul. L'Harmattan, 2004, pp. 201-227.

 

« Quelques étapes à suivre pour prendre une décision éthique » - http://www.portailrh.org/expert/ficheSA.aspx?p=594304

 

D’après C. Bolly et V. Grandjean (2004) : L’éthique en chemin, Weyrich, « Démarche d’aide à la décision en 4 temps » - https://www.provincedeliege.be/sites/default/files/media/7780/2_demarchedaidede%CC%81cisionen4temps_laurent.pdf

 

 

 Annexe: Les principaux courants de l'éthique en éducation:

 

Les principaux courants de l’éthique en éducation

 

 

Nom des courants

Explication des courants

Les éthiques déontologiques :

Elles considèrent que l’être humain doit soumettre son action à des principes absolus qui ne doivent pas être enfreints quelque soit les circonstances.

- L’humanisme personnaliste

L’humanisme personnaliste met en avant l’existence de principes moraux absolus que doivent respecter les êtres humains. Le principe principal est la « sacralité de la personne » humaine. Cela signifie que l’on ne peut pas par exemple vendre une personne ou même le corps humain (ex : organes) car l’être humain a une valeur inestimable en soi, il n’a pas de prix. La finalité de l'éducation est le respect de la personne humaine. (Exemple : Kant)

- Ethique de la discussion

L’éthique de la discussion considère que les règles de l’éthique peuvent être élaborées par une discussion collective rationnelle. (ex : Habermas)

- Ethique des valeurs

L’action de l’enseignant doit être orienté en fonction de valeurs. Ces valeurs peuvent être des valeurs individuelles ou imposées par un cadre politique comme les valeurs de la république (liberté, égalité, fraternité, laicité…). Ces valeurs peuvent néanmoins entrer en contradiction les unes avec les autres : il peut donc être nécessaire de les hiérarchisés ou de les concilier entre elles. (Ex : Weber)

Les éthiques conséquentialistes :

Elles considèrent qu’il s’agit de tenir compte des conséquences des actions, et non pas de se limiter à des principes absolus.

Ethique utilitariste

L’éthique utilitariste considère que les décisions prises doivent être mesuré à l’aune de leur utilité pour le bonheur commun (défini comme un optimum entre les plaisirs et les peines). Elle accorde une importance primordiale à l’efficacité. (Exemple : Bentham)

Ethique pragmatique

Elle accorde une importance particulière à la situation. Il s’agit d’adapter les règles générales au cas particulier. Elle se fonde sur la notion d’équité. (ex : Aristote)

Autres courants d’éthique :

 

Ethique de la critique

L’éthique de la critique met en avant l’existence d’inégalités sociales et de discriminations sociales. Elle considère que la priorité doit être d’orienter l’action des enseignants vers la justice sociale (ex : Paulo Freire)

Ethique du care

L’éthique du care met en avant l’importance des relations de bienveillance à l’égard d’autrui. Elle considère que la relation à autrui doit être orientée vers le soin à autrui (ex : Giligan)

Ethique des vertus

L’éthique des vertus essaie de déterminer qu’elles sont les principales valeurs que doivent mettre en œuvre les enseignants dans leur action : sens de la justice, bienveillance, tact… (ex : Prairat)