L’actualité au prisme de la philosophie
Le scandale du Médiator n’interroge pas uniquement la société du risque, c’est-à-dire la question de savoir à partir de quelle limite on peut considérer que le risque induit par un médicament
est supérieur à ses bénéfices. Cette affaire pose avant tout la question des relations entre soins pharmaceutiques et intérêts capitalistes.
Ce qui est apparu comme le plus choquant dans l’affaire du Médiator, c’est de constater qu’une substance qui est prescrite pour soigner puisse être la cause de la mort de centaines de personnes, que cette substance ait été maintenue en vente sur le marché alors que l’on en connaissait les dangers et ce avant tout dans l'intérêt économique des propriétaires d’une entreprise.
L’affaire du Médiator met ainsi en avant le pouvoir de transvaluation des valeurs que possède le système capitaliste.
- De la valeur d’usage à la domination de la valeur d’échange
Marx, dans le livre I du Capital, distingue l’échange marchand de l’échange capitaliste.
La circulation marchande (M - A - M’) est orientée par la valeur d’usage: un individu échange une marchandise contre de l’argent pour obtenir une marchandise qui lui parait plus utile.
L’échange capitaliste (A-M-A’) est au contraire orienté par le désir de gagner plus d’argent: le capitaliste détient de l’argent qu’il va échanger contre une marchandise qu’il échange contre encore plus d’argent.
Ce que Marx appelle le fétichisme de la monnaie conduit à croire que c’est la quantité d’argent qu’est prêt à débourser un acheteur pour acquérir une marchandise qui fixe sa valeur d’échange alors qu’en réalité celle-ci est fixée par la quantité de travail socialement nécessaire pour la produire qui y est incorporée.
Le fétichisme de l’argent qui tend à invisibiliser la valeur travail qui sous-tend la valeur d’échange constitue le premier renversement idéologique des valeurs qu’opère le capitalisme. Il faut en effet se souvenir que pour Marx, comme il le précise dans son ouvrage l’Idéologie allemande, l’idéologie opère un renversement, comme dans une chambre noire photographique, de la réalité.
- La transvaluation des valeurs opérée par l’économie capitaliste
Pour Nietzsche, l’expression de “transvaluation des valeurs” (ou inversion des valeurs) caractérise un processus par lequel les anciennes valeurs mortifères sont abandonnées pour en créer de nouvelles qui exaltent la puissance de la vie. Il s’agit d’un phénomène positif.
Il est possible à notre avis de considérer que l’économie capitaliste opère une transvaluation mortifère des valeurs dont le caractère positif pour l’humanité peut être interrogé.
Ainsi peut-on penser que le scandale du Médiator constitue un effet de cette transvaluation. Il devient ainsi plus désirable pour des acteurs d’augmenter leur profit que d’agir de manière à préserver la santé d’autres individus. Alors que la santé pourrait apparaître comme un bien socialement valorisé et désirable par tous et pour tous, l’économie capitaliste fait apparaître l’enrichissement (la chrématistique) comme plus désirable encore. Voilà une éthique qui semblerait bien déroutante aux sagesses antiques grecques !
Cette transvaluation des valeurs opérée par l’économie capitaliste peut être illustrée par de nombreux éléments. Ainsi par exemple ce ne sont pas les professions les plus socialement utiles (comme médecin ou enseignant) qui vont être les mieux rémunérées ou apparaître les plus désirables aux jeunes gens, mais celles qui permettent de faire gagner le plus d’argent possible. Ainsi voit-on aujourd’hui nos plus brillants mathématiciens ou ingénieurs s’orienter vers les mathématiques financières et les carrières de traders.
De même, des activités qui semblent relever initialement du loisir, telles que des activités sportives, peuvent se voir attribuer des rémunérations parmi les plus élevées alors que d’autres professions liées à la satisfaction des besoins de la survie la plus élémentaire, comme l’agriculture, fournissent difficilement des revenus corrects.
Le caractère mortifère de cette transvaluation transparaît également par exemple dans la place que peuvent occuper dans nos économies la vente d’armes ou encore les industries dangereuses et polluantes.
Pour aller plus loin:
Ce qui est apparu comme le plus choquant dans l’affaire du Médiator, c’est de constater qu’une substance qui est prescrite pour soigner puisse être la cause de la mort de centaines de personnes, que cette substance ait été maintenue en vente sur le marché alors que l’on en connaissait les dangers et ce avant tout dans l'intérêt économique des propriétaires d’une entreprise.
L’affaire du Médiator met ainsi en avant le pouvoir de transvaluation des valeurs que possède le système capitaliste.
- De la valeur d’usage à la domination de la valeur d’échange
Marx, dans le livre I du Capital, distingue l’échange marchand de l’échange capitaliste.
La circulation marchande (M - A - M’) est orientée par la valeur d’usage: un individu échange une marchandise contre de l’argent pour obtenir une marchandise qui lui parait plus utile.
L’échange capitaliste (A-M-A’) est au contraire orienté par le désir de gagner plus d’argent: le capitaliste détient de l’argent qu’il va échanger contre une marchandise qu’il échange contre encore plus d’argent.
Ce que Marx appelle le fétichisme de la monnaie conduit à croire que c’est la quantité d’argent qu’est prêt à débourser un acheteur pour acquérir une marchandise qui fixe sa valeur d’échange alors qu’en réalité celle-ci est fixée par la quantité de travail socialement nécessaire pour la produire qui y est incorporée.
Le fétichisme de l’argent qui tend à invisibiliser la valeur travail qui sous-tend la valeur d’échange constitue le premier renversement idéologique des valeurs qu’opère le capitalisme. Il faut en effet se souvenir que pour Marx, comme il le précise dans son ouvrage l’Idéologie allemande, l’idéologie opère un renversement, comme dans une chambre noire photographique, de la réalité.
- La transvaluation des valeurs opérée par l’économie capitaliste
Pour Nietzsche, l’expression de “transvaluation des valeurs” (ou inversion des valeurs) caractérise un processus par lequel les anciennes valeurs mortifères sont abandonnées pour en créer de nouvelles qui exaltent la puissance de la vie. Il s’agit d’un phénomène positif.
Il est possible à notre avis de considérer que l’économie capitaliste opère une transvaluation mortifère des valeurs dont le caractère positif pour l’humanité peut être interrogé.
Ainsi peut-on penser que le scandale du Médiator constitue un effet de cette transvaluation. Il devient ainsi plus désirable pour des acteurs d’augmenter leur profit que d’agir de manière à préserver la santé d’autres individus. Alors que la santé pourrait apparaître comme un bien socialement valorisé et désirable par tous et pour tous, l’économie capitaliste fait apparaître l’enrichissement (la chrématistique) comme plus désirable encore. Voilà une éthique qui semblerait bien déroutante aux sagesses antiques grecques !
Cette transvaluation des valeurs opérée par l’économie capitaliste peut être illustrée par de nombreux éléments. Ainsi par exemple ce ne sont pas les professions les plus socialement utiles (comme médecin ou enseignant) qui vont être les mieux rémunérées ou apparaître les plus désirables aux jeunes gens, mais celles qui permettent de faire gagner le plus d’argent possible. Ainsi voit-on aujourd’hui nos plus brillants mathématiciens ou ingénieurs s’orienter vers les mathématiques financières et les carrières de traders.
De même, des activités qui semblent relever initialement du loisir, telles que des activités sportives, peuvent se voir attribuer des rémunérations parmi les plus élevées alors que d’autres professions liées à la satisfaction des besoins de la survie la plus élémentaire, comme l’agriculture, fournissent difficilement des revenus corrects.
Le caractère mortifère de cette transvaluation transparaît également par exemple dans la place que peuvent occuper dans nos économies la vente d’armes ou encore les industries dangereuses et polluantes.
Pour aller plus loin:
Beck U., La société du risque
Aristote, L’éthique à Nicomaque
Marx K. et Engels F., L’idéologie allemande
Marx K., Le capital, Livre I
Nietzsche F., L’antéchrist
Aristote, L’éthique à Nicomaque
Marx K. et Engels F., L’idéologie allemande
Marx K., Le capital, Livre I
Nietzsche F., L’antéchrist
Écrire commentaire