Autonomie individuelle et autonomie sociale en éducation

 

 

La notion d’autonomie est mise en avant comme un objectif des nouvelles pédagogies, mais également du discours néolibéral. Néanmoins, il est nécessaire de penser l’autonomie individuelle dans ses relations avec l’autonomie sociale.

 

La notion d’autonomie : au coeur de la définition de l’individu libéral

 

Auto-nomos : se donner à soi-même ses propres règles.

 

La notion d’autonomie individuelle est constitutive de la définition du sujet libéral. Ainsi le philosophe Emmanuel Kant fait de l’autonomie de la volonté une condition de possibilité de la moralité à partir d’une anthropologie libérale du sujet humain.

 

La morale est chez Kant fortement distinguée des mœurs sociales pour être renvoyée à la raison souveraine de chaque sujet. La capacité du sujet à déterminer sa volonté indépendamment des motifs sensibles et du conformisme social constitue la caractéristique du sujet moral libéral.

 

L’anthropologie libérale conçoit en effet l’individu comme une entité qui pré-existe au social. La société n’est alors que l’agrégation des actions individuelles. Dans la vision qui est celle de l’économie néo-classique, les actions individuelles peuvent être modélisées à partir d’un calcul d’intérêt rationnel. A la différence de l’autonomie de la volonté kantienne, ce sont ici les intérêts sensibles individuels qui constituent le moteur de l’action rationnelle.

 

Les individus libéraux sont pensés comme indépendant des déterminismes sociaux. Ils orientent leurs actions en fonction de choix rationnels individuels.

 

Dialectique de l’autonomie sociale et de l’autonomie individuelle

 

Les penseurs de la critique sociale, comme Proudhon, Bookchin ou encore Castoriadis par exemple, ont pensé l’autonomie individuelle dans sa dialectique avec l’autonomie sociale.

 

C’est en particulier le cas en ce qui concerne l’éducation telle qu’elle a été pensée par Castoriadis à travers le concept de Paideia.

 

En effet, la démocratie est un régime politique très particulier car il est le seul qui repose sur l’auto-institution par les citoyens eux-mêmes.

 

Cela signifie par conséquent, que le système démocratique est un régime qui implique l’idée d’une société autonome, mais cette société autonome n’est possible que si les individus sont autonomes au sens où ils sont capables de penser et de décider par eux-mêmes.

 

Mais pour Castoriadis, cette capacité d’autonomie n’est pas innée en l’être humain, elle suppose une éducation à un ethos démocratique.

 

De ce fait, pour lui l’autonomie sociale et l’autonomie individuelle impliquent une co-construction.

 

Néanmoins, il est important également de souligner que pour Castoriadis, non seulement la seule démocratie véritable est la démocratie directe, mais en outre, la démocratie n’est pas compatible avec le système capitaliste. En effet, ce dernier entraîne la confiscation du pouvoir par une oligarchie du fait des inégalités de fortune.

 

Conclusion :

 

 

Parler d’éducation à l’autonomie individuelle n’a pas de sens, si les conditions socio-politiques de cette autonomie ne sont pas pensées comme faisant parti de cette éducation. De fait, une éducation à l’autonomie individuelle prend en compte l’apprentissage de la démocratie à l’école. Elle prend en compte le fait que l’enfant n’est pas un être à l’état de nature et qu’il arrive à l’école avec une socialisation liée à son origine sociale. De ce fait, la construction de l’autonomie doit prendre en compte la socialisation sociale afin d’éviter un ethnocentrisme social de classe moyenne de la part de l’enseignant-e qui prend comme des évidences sociales des comportements d’autonomie qui ont été socialement construits. Cette notion même d’autonomie pouvant prendre en réalité des acceptions socialement différentes : l’autonomie dans l’économie néolibérale n’est pas la même que dans une société décroissante.