La conception républicaine classique a eu tendance à faire de l’école un sanctuaire neutre, coupé de toutes luttes sociales. A l’inverse, certaines théories marxistes ont fait de l’école uniquement un espace au service des intérêts capitalistes. Mais la réalité de l’école est plus complexe.
L’Education nationale impose un devoir de neutralité politique, économique, philosophique et religieux. Cependant cette institution n’est pas neutre dans la mesure où elle va elle-même promouvoir des valeurs comme les “valeurs de la République”.
En réalité, les contenus enseignés à l’école et leur variation sont état également du rapport social des forces dans la société.
L’école, par exemple, à travers le Parcours d’Avenir propose l’éducation à l’entreprise et vise l’employabilité, tout comme à travers le Parcours citoyen, elle propose l’éducation à la non-discrimination.
Ces deux conceptions ne sont pas nécessairement compatibles. La concurrence économique prônée par le néolibéralisme génère et de l’exclusion sociale et de la pauvreté. Cela conduit à des discriminations à l’égard des “personnes en situation de vulnérabilité économique”.
L’Education nationale peut donc être décrite comme un champ de forces contradictoires avec des changements dans l’équilibre des forces qui tirent le centre de gravité de l’institution scolaire parfois plus à gauche ou plus à droite sur tel ou tel point. Mais de manière générale, ce qu’il est possible de dire, c’est qu’il existe des tendances contradictoires au sein de ce champ de force.
C’est en cela que Henry Giroux présente l’institution scolaire à la fois comme un espace de reproduction sociale (Bourdieu) et comme un espace de résistance (Willis). L’enseignant-e a un rôle à jouer dans la lutte culturelle contre-hégémonique.
La pédagogie critique constitue une orientation au sein de ce champ de force. Il s’agit d’utiliser sa marge de manoeuvre pédagogique, en tant qu’enseignant-e, pour promouvoir la lutte contre les discriminations, les inégalités sociales et la défense des droits humains, plutôt que de promouvoir la notion néolibérale d’”employabilité” (qui va plus loin idéologiquement que de trouver un emploi) ou la formation à l’esprit d’entreprise.
Au sein de ce champ de force, il s’agit de défendre les valeurs qui font le ferment de la démocratie et des droits humains, plutôt que les valeurs qui servent les intérêts particuliers qui creusent les inégalités sociales.