La notion de dignité de la personne humaine s’est imposée dans plusieurs textes fondamentaux du droit après la Seconde Guerre mondiale, puis par la suite en bioéthique. L’arrivée de recherches en éducation qui s’appuient sur l’efficacité conduit à interroger la place de cette valeur relativement à celle de dignité humaine.
1. La notion de «dignité de la personne humaine »
Si la notion de dignité attribuée à tous les êtres humains est pensée depuis les philosophes stoïciens dans l’Antiquité, elle s’impose comme un principe du droit après le Seconde Guerre mondiale.
On la retrouve dans plusieurs textes du droit international à commencer par la Déclaration Universelle des Droits de l’homme de 1948 :
« Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité. »
On retrouve cette notion également dans la Convention Internationale de droits de l’enfant :
« Les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées pour veiller à ce que la discipline scolaire soit appliquée d’une manière compatible avec la dignité de l’enfant en tant qu’être humain et conformément à la présente Convention. »
Cette notion de « dignité » est également mobilisée par exemple dans les lois de bioéthique en France, mais aussi également par exemple dans le droit du travail.
2. Dignité de la personne humaine et lutte contre les discriminations
Le droit de la non-discrimination découle en particulier de l’article premier de la Déclaration internationale des droits de l’homme.
C’est sur cette base que le droit européen a construit un droit de la non-discrimination que l’on retrouve transposé également en droit français.
Ce droit européen fait obligation également aux Etats membres de promouvoir dans leur système scolaire la non-discrimination, d’où le fait que l’on retrouve cette dimension dans le système éducatif français.
A cet égard, le référentiel de compétence des enseignants revient à plusieurs reprises sur l’obligation qui est faite aux enseignants de lutter contre les discriminations : «le refus de toutes les discriminations », « Se mobiliser et mobiliser les élèves contre les stéréotypes et les discriminations de tout ordre »…
3. Dignité de la personne humaine et efficacité
De fait si la société française, par exemple l’entreprise ou l’école, doit respecter le droit de la non-discrimination ce n’est pas parce que c’est efficace.
L’efficacité par exemple économique, contrairement à ce que prétend un rapport de France Stratégie, ne peut être le ressort fondamental qui doit être à l’origine du respect de droit de la non-discrimination.
Si l’on suit les textes juridiques, ce qui doit être au fondement de la lutte contre les discriminations, c’est le « respect de la dignité de la personne humaine ».
L’école ne doit pas combattre les discriminations parce que cela sera plus efficace économiquement ou combattre les inégalités sociales parce que PISA (OCDE) juge qu’un système éducatif équitable est plus efficient.
L’école doit lutter contre les discriminations, même si cela réduisait l’efficacité du système scolaire, parce que cela renvoi à un principe fondamental du droit : le respect de la dignité de toutes les personnes.
L’école n’a pas vocation a se donner comme objectif l’efficacité au besoin en se séparant de tout ce qui la rendrait moins efficace : les élèves en situation de handicap, les pauvres, les professeurs pas assez efficaces…
Conclusion :
La mise en avant par certains pend de la recherche, de l’efficacité comme valeur absolue du système éducatif, pose de graves problèmes philosophiques. En effet, de nombreux travaux philosophiques concernant le débat entre conséquentialisme et déontologisme ont montré que la mise en avant de l’efficacité peut entrer en contradiction avec la dignité de la personne humaine.
En faisant de l’efficacité, la valeur fondamentale du système éducatif on entrerait philosophiquement en contradiction avec les principes fondamentaux des droits humains qui reconnaissent pour leur part comme principe fondamental la « diginité » humaine.
Référence :
CIDE de 1989
CNCDH – Origines du droit de la non-discrimination - https://www.cncdh.fr/fr/dossiers-thematiques/discriminations
DUDH de 1948
Manuel européen du droit de la non-discrimination.
Fabre-Magnan, Muriel. « La dignité en Droit : un axiome », Revue interdisciplinaire d'études juridiques, vol. volume 58, no. 1, 2007, pp. 1-30.
Rapport : Le coût économique des discriminations - https://www.strategie.gouv.fr/publications/cout-economique-discriminations
Sève Lucien, Qu’est-ce que la personne humaine ?, La Dispute, 2006.