Mon ami Pablo Servigne s’est fait connaître depuis quelques années en écrivant sur l’Effondrement. Aujourd’hui, nous sommes face à une pandémie mondiale et peut être face au prélude de l’effondrement d’un monde, celui de la mondialisation néolibérale. Cela personne ne le sait...
Depuis plusieurs années, certaines personnes se préparent à l’effondrement. On les appellent les survivalistes. Ils pensent qu’ils vont survivre en se préparant à un univers post-apocalyptique avec force entraînement commando et kit de survie alimentaire. Ils sont prêts…
Mais, il y a une dimension sans doute plus profonde et plus important de la survie, c’est celle de notre âme. C’est la question que poste Jean-Michel Chaumont dans son ouvrage Survivre à tout prix ?. Faut-il chercher à survivre à tout prix ? A quelle condition est-il digne de survivre ou au contraire à partir de quand faudrait-il accepter de sacrifier sa survie personnelle pour défendre des valeurs que l’on estime supérieures ?
Le psychanalyste Bruno Bettelheim, dans son ouvrage Le coeur conscient, revient sur l’expérience qu’il a tiré de sa survie dans les camps de concentration. Il s’est étonné du fait que ceux qui ont survécu ne sont pas ceux dont il aurait imaginé la survie dans les camps de concentration. Il y a ceux qu’il qualifie de bourgeois de la classe moyenne : ceux là, sans véritables valeurs, ce sont avilis dans le camp. Au contraire, à son étonnement, deux groupes ont particulièrement résisté moralement à l’indignité de l’univers du camp : les prisonniers politiques et les témoins de Jéhovah. Qu’avaient donc en commun ces deux groupes ? Le fait d’être organisés et solidaires. Mais également le fait d’adhérer à des valeurs pour lesquels sans doutes il auraient été prêts à faire des sacrifices, et peut être même à sacrifier leur propre existence.
Un autre psychologue a analysé son expérience de survie dans les camps, il s’agit du docteur Viktor Frankl. Ce dernier a été l’un des fondateurs de la psychologie existentielle. Sa thèse consiste à considérer que la survie dans des conditions extrêmes ou face à une épreuve de l’existence consiste à parvenir à préserver un sens à l’existence. Là également, Frankl admet que celles ou ceux qui parviennent à survivre de manière digne à ce type d’épreuve dans l’existence sont ceux ou celles qui réussissent à transcender leur existence personnelle dans des valeurs et des actions.
Dans la psychologie existentielle de Frankl, l’angoisse n’est pas un affect qu’il s’agit de combattre en soi, mais qu’il convient de limiter afin qu’il ne paralyse pas toute l’existence. De même, pour Frankl, le bonheur n’est pas la finalité de l’existence, c’est la recherche du sens de l’existence qui constitue la dimension la plus importante, le bonheur n’est tout au plus qu’un effet d’une existence auquel on est capable de donner un sens.
Bibliographie :
Bettelheim, Bruno. Le cœur conscient. R. Laffont, 1972.
FRANKL, Viktor. Trouver un sens à sa vie. Paris, Les éditions de l’Homme, 2005.
Chaumont, Jean-Michel. Survivre à tout prix?: essai sur l'honneur, la résistance et le salut de nos âmes. La Découverte, 2017.
Abrami, Léo Michel. La recherche du sens en analyse existentielle et logothérapie. Editions L'Harmattan, 2015.
Bernaud, Jean-Luc. Introduction à la psychologie existentielle. Dunod, 2018
Sarfati, Georges-Elia. Manuel d'analyse existentielle et de logothérapie. Dunod, 2018.