Pédagogie critique numérique et artivisme en ligne :

 

 

Dans quelle mesure les pratiques d’artivisme en ligne peuvent nourrir les pratiques en pédagogie critique numérique ?

 

1. Pratiques de création et pédagogie critique :

 

Outre le théâtre de l’opprimé, il est possible de citer d’autres pratiques qui peuvent s’approcher de pratiques de création esthétiques et de la pédagogie critique.

 

- Photovoice : Il s’agit d’une méthodologie de recherche-action participative qui a été développée dans les années 1990 par deux universitaires américaines. Il s’agit d’une pratique de recherche qui intègre la prise de photographie par les participant-e-s. Néanmoins la visée est avant tout liée à un objectif de recherche plus qu’à un objectif esthétique.

 

Guide méthodologique de photovoice

https://www.rutgers.international/sites/rutgersorg/files/PDF/French_material/2016_Photovoice_Manual_Fr.pdf

 

- Public Policy Collage - https://participedia.net/method/4848

Il s’agit d’une méthodologie participative qui utilise le collage pour favoriser un engagement citoyen.

 

- Digital storytelling – Le digital storytelling désigne à la base une approche qui permet aux groupes socialement minorisés de raconter leurs histoires. En particulier, cela prend souvent la forme de courts diaporama sonores qui incluent une voix off, des photo, mais aussi de la video et du texte.

On peut néanmoins constater que le digital storytelling illustre toutes les ambivalences de approches artistiques. En effet le digital storytelling a fait l’objet d’une réappropriation non seulement dans le domaine pédagogique (il est utilisé comme technique d’enseignement dans des universités), mais également par le marketing commercial pour promouvoir des marques ou des produits.

 

Truchon, Karoline. « Le Digital Storytelling : pratique de visibilisation et de reconnaissance, méthode et posture de recherche. » Anthropologie et Sociétés, volume 40, numéro 1, 2016, p. 125–152. https://doi.org/10.7202/1036374ar

 

Dans le cas du digital storytelling (dans sa visée initiale), nous sommes bien face à une pratique qui intègre l’usage du numérique pour opérer une forme de pédagogie critique.

 

Artivisme en ligne : quelles pratiques à charge critique ?

 

- Le graphisme (en particulier féministe) : Une première forme d’artivisme en ligne concerne le graphisme. En effet, les réseaux sociaux, qui sont des espaces de mobilisation comme cela a été montré dans différents travaux, favorisent le recours des visuels graphiquement percutant.

 

Marie-Anne Paveau, « Féminismes 2.0. Usages technodiscursifs de la génération connectée », Argumentation et Analyse du Discours [En ligne], 18 | 2017, mis en ligne le 14 avril 2017, consulté le 18 janvier 2021. URL : http://journals.openedition.org/aad/2345 ; DOI : https://doi.org/10.4000/aad.2345

 

- Le détournement de publicité : La pratique du détournement publicitaire est aussi une forme d’artivisme courante sur Internet. Elle pose directement la force de son effet dans la mesure où elle peut avoir un impact sur l’image de la marque.

 

Toti, Jean-François. « Détournement publicitaire militant : quels impacts sur la marque détournée ? », Revue de l’organisation responsable, vol. vol. 15, no. 2, 2020, pp. 17-28.

 

- Le collage : On trouve également des artistes qui utilisent le collage comme forme d’artivisme en ligne. C’est le cas par exemple au Chili.

 

« Collage art and activism in Chile: Instagram posts building on the legacy of Latin American ‘mail art’ », The Conversation - https://theconversation.com/collage-art-and-activism-in-chile-instagram-posts-building-on-the-legacy-of-latin-american-mail-art-127948

 

Textes de réflexion :

 

Fred Turner : L’usage de l’art- La place de l’art dans le Silicon Walley – le nouvel esprit du capitalisme et l’art. https://entreleslignesentrelesmots.blog/2020/12/30/rapports-de-pouvoir-invisibilises-par-des-performances-chatoyantes/

 

Oriane Castel, « L’art contemporain est-il politique ? » - https://www.art-critique.com/2020/03/art-contemporain-est-il-politique-1-3/

L’auteure critique l’art engagé très présent dans l’art contemporain. Elle se situe dans la continuité de l’ouvrage de Carole Talon-Hugon, L’art sous contrôle. Une des critiques que O. Castel fait à l’art engagé est de ne pas conduire à une transformation sociale, mais seulement à une indignation. Elle considère au contraire que les sciences sociales déconstruisent la réalité sociale et de ce fait aident à une émancipation sociopolitique à la différence de l’art.

 

 

Pour compléter cette réflexion, on peut voir que se dégage deux thèses. La première, c’est le fait que l’artivisme viendrait rejoindre une certaine culture de l’indignation que l’on retrouve dans les réseaux sociaux. Or cette culture de l’indignation ne se traduirait pas nécessairement en engagement de transformation sociale. Néanmoins, cette thèse semble être combattue par les tenants de l’art social qui affirment au contraire que l’art social a un effet performatif sur l’engagement militant.